Bir-Djedid Saint-Hubert

 

Le Centre de Colonisation de Bir-Djedid Saint-Hubert


Les premières automobiles qui affrontèrent le parcours Casablanca-Mazagan, empruntaient la piste côtière qui passe par Dar-Bou-Azza, Bir Retma, Dar-El Hadj-Kacem et le camp d’EI-Aïachi ; elles franchissaient l’Oum-er-Rebia, à Azemmour, sur des barcasses. Le trajet, qui ne durait que quatre heures – si tout allait bien -, (quand élèvera-t-on un monument aux «Renault», « Rochet Schneider », « Berliet », « Germain », « Ford», de ces temps héroïques : 1911-1914, comportait une série d’émotions variées : d’abord, les «têtes de chat » des environs de Dar-Bouazza qui se chargeaient de « dénoyauter » la roue la mieux assujettie; puis, les traîtres sables des Soualem qui buvaient vos quatre roues, d’autant plus sûrement qu’on était occupé à fouiller du regard le taillis grouillant de bestioles : lièvres, renards, chats-lynx, chacals, sangliers; la plume, c’était, l’été surtout : le perdreau et le ramier, et l’hiver : toute la sauvagine, sur les flaques d’eau, et la bécasse. Puis, encore des alternances de sable et d’affleurement rocheux, à travers la brousse des Chiadma peuplée à peu près de la même faune que les Soualem, mais où les chasses à courre étaient nettement plus intéressantes, parce que cette brousse n’obstruait pas le paysage comme le taillis de là-bas et que, du haut du cheval, on dominait nettement la situation. Puis, encore du sable et des cailloux jusqu’à EI-Aïachi, où devant Azemmour, on trouvait les barcasses. Si j’évoque cette première voie autocyclable entre Casablanca et Mazagan, c’est pour constater que, si elle avait été transformée en route définitive, le Bir-Djedid d’aujourd’hui se trouverait probablement à Dar-el-Hadj-Kacem où exista la première cantine divisant la route en deux étapes à peu près égales. Cette cantine, installée par notre compatriote Prévost, propriétaire d’un Hôtel très achalandé à Azemmour, (il est aujourd’hui notable au Maarif, à Casablanca, et· je suis heureux de dire publiquement qu’il fût souvent une providence pour les premiers colons), était naturellement rudimentaire : une salle avec des tables et des bancs ; une chambre avec un lit ; pas de personnel, en dehors d’un gardien indigène. Un tarif était affiché au mur, et l’on mettait, si mes souvenirs sont exacts, le prix de la dépense (les consommations étaient de petites bouteilles-échantillon alignées dans une vitrine) dans une boite ad hoc. Mais cela ne fût pas, car la route définitive tracée loin de la côte pour desservir des terres plus nombreuses et plus riches et inaugurée en 1915, avait vu son étape médiane se finir au kilomètre 45, près d’un puits d’une eau excellente, connu sous le nom de Bir-Djedid, le puits nouveau. Là aussi, le premier établissement européen fût une cantine qui, reprise en mains bientôt par notre camarade Louis Blanc, est devenue la confortable halte de Saint-Hubert, refuge ; apprécié des chasseurs, dont le patronyme, joint au vocable arabe, a fini par former le nom officiel de la localité. Or, il y avait dans l’hinterland de Bir-Djedid- Saint-Hubert, bien avant la création de la route impériale Casablanca Mazagan, des colons européens. Ces colons, dont le nombre croissait avec les années, prirent, dès la création de la halte de Saint-Hubert, l’habitude d’y venir à cheval, attendre les autos qui les transportaient à Casablanca ou à Mazagan. Ils s’y rencontraient donc et apprenaient à se connaître ; ils s’y ravitaillaient, tant chez Blanc qu’au Souk el-Khemis ; ils y trouvaient leur courrier dont Blanc avait bien voulu accepter de leur faire le service à titre provisoire. De ces rencontres renouvelées, de ce foyer de vie économique et civique qu’était devenue la halte de Saint-Hubert, jaillit un jour l’idée de concrétiser l’entraide mutuelle et la solidarité dont chacun sentait le besoin, et l’on créa le Groupement Amical de Bir-Djedid Saint-Hubert. En dix ans, ce groupement, soit sous l’action de son premier Président, Paul Lemoine mort hélas ! en 1924 -, soit sous celle de son successeur, Guillaume Chavent, a consacré, en parfaite harmonie avec les autorités qui se sont succédées à Azemmour et à Mazagan, toute son activité et toute son énergie à équiper la région et à la doter des services publics les mieux organisés :

1.      Le Groupement Amical a, dès le début, poursuivi une politique de routes et de pistes dont le réseau actuel dessert absolument toutes les exploitations et canalise les courants économiques de la Région.

2.      Il a construit, en grande partie aux frais de ses membres, la première poste officielle, lorsque l’ami Blanc fut obligé de renoncer à son exploitation provisoire des P.T.T. Il a obtenu ce service de Rekkas à bicyclette, qui fait qu’à midi, le colon le plus éloigné a son courrier du jour en mains (aujourd’hui, des services analogues fonctionnent partout ; c’est Bir-Djedid qui a inauguré l’organisation-type). Il a fait décider par l’Administration la création de ces circuits téléphoniques ruraux qui, bientôt, desserviront beaucoup de fermes.

3.      Il a poursuivi la mise en valeur de la région en faisant donner à la colonisation officielle toute la brousse des « Chiadma-Chtoukas »

4.      Il a, dès 1923, réclamé la création du village de Bir-Djedid - Saint-Hubert qui comprend aujourd’hui, outre les commerçants de la première heure et les artisans nouveaux, une école de soixante enfants avec cantine scolaire et internat pour filles et garçons ; une infirmerie avec attaché européen permanent ; une villa des P.T.T. modèle ; une gendarmerie monumentale ; un parc d’un hectare ; une vaste succursale de l’Auxiliaire Agricole et, enfin, un cimetière, hélas trop fréquenté. Un château-d ’eau, alimenté par un puits des travaux publics, foré à cet effet, permettra, à brève échéance, de distribuer le précieux liquide par canalisation dans le village.

5.     Il a enfin, dès la construction de l’Usine Hydro-Electrique de Si Saïd Maachou, envisagé l’électrification du village par transformateur et d’un circuit de fermes par réseau de moyenne tension ; ce projet, traité dès l’abord d’utopique par certains pontifes du cru, recevra, en 1933, un commencement de réalisation. Bir-Djedid - Saint-Hubert, qui fait partie de la circonscription des Doukkala, mais qui est situé à la frontière de la Chaouïa, sera tôt au tard une importante annexe de Contrôle Civil. Village et hinterland Doukkala groupent actuellement environ soixante-dix foyers. Ce n’est qu’une étape d’un développement régulier et constant.



Guillaume CHAVENT. Président de la Chambre Mixte de Mazagan ; Président du Groupement Amical de Bir-Djedid-Saint-Hubert.

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